mercredi 21 octobre 2020

Disco secrète de l'Un #7/10 : GODFLESH s/t


 « The end of false metal » (Godflesh)

Ce putain de son. Des oreilles qui n’en finissent pas de saigner près d’une trentaine d’années plus tard.  Avec la mention « ex-membres de Napalm Death » les flyers appâtaient un chaland alors ivre d’une musique alors toujours plus rapide, plus extrême. Audience hébétée. Des oreilles incrédules qui vacillaient sous une rythmique de plomb et ce mur de larsen. Une performance monolithique qui aura définitivement modifié mon approche jusqu’alors plutôt basique de la musique, confronté à quelque chose d’atonal, frontal et sans trop de concession (pour l’époque).

Alors oui ok d’accord, le premier Godflesh ressemble plus à un discret coup d’essai si on le compare à l’indépassable rouleau compresseur du Streetcleaner qui lui succèdera. Mais avec ce premier Godflesh,  tous les éléments qui  feront ou déferont le son et la chair du groupe sont déjà alignés. Le duo de Birmingham est paré à faire déferler sur un monde encore naïf son « avalanche (..Master Song ») de guitares pitchées et de rythmiques martiales en pilotage semi-automatique. Avec « Spinbender », les fréquences malignes des infra-basses distordues se chargeront de parachever ce travail d’exécution dans les règles. Dans un mouvement rampant de syncope maitrisée, Godflesh vous prend aux tripes avec la détermination lucide d’un zélote, tandis que la définition de la musique "métal" jusque là assez orthodoxe en prend un sacré coup à s’hybrider de la sorte. Les influences sont multiples et se superposent en strates épaisses et sur-saturées : on pense à Killing Joke, l'indus deThrobbing Gristle, mais aussi à du dub ou de la musique électronique (qui imprégneront dans des proportions variables  les albums suivants). Mais l’hypnotique  « Wound » et ses transes de larsens technoides en boucles n’auront pas vraiment de filiation directe dans la carrière de Godflesh, tout comme le nauséabond « Streetcleaner 2 » qui se perd dans des ambiances oppressantes de caniveau (qui lorgneraient presque vers la misanthropie de l’acolyte Scorn). Ces deux derniers brûlots abrupts (qui ne figuraient pas dans l’édition originale) connaitront une suite dans les indénombrables side-projects de Justin K. Broadrick. Par la suite, le duo versera parfois dans des expérimentations abrasives et mutantes, sans néanmoins réellement s’éloigner des canons gravés dans le marbre surchauffé de cet album éponyme. La formule est restée simple : Godflesh se contente de décliner les mille et une méthodes extatiques d'une interminable strangulation sonique.

 

L'Un.

GODFLESH (Swordfish. 1988)

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire