dimanche 22 novembre 2015

DOMMENGANG : "Everybody's Boogie" (ou la Brooklyn boogie connection)


Brooklyn, en passe de devenir la capitale du boogie de péquenauds et tignasses crasseuses associées ? On est pas loin de le penser avec la sortie de ce premier album. On pense aux vieux briscards de Endless Boogie, qui eux aussi  battent le pavé et hantent les dernières arrière-salles glauques du bourough newyorkais désormais le plus couru. Si les gars se connaissent et s’apprécient mutuellement, l’analogie s’arrête là. Question de génération. Et d’orthodoxie. Si Endless Boogie s’applique à recracher fidèlement un blues électrifié, linéaire et graisseux, la musique de Dommengang,  tout en s’articulant autour du concept central de boogie-rock (think ZZ Top…), convoque la teigne d’un certain proto-punk (think Stooges…), l’enveloppant d’un trouble velours arty (think Velvet Underground….). L’introductif morceau éponyme le confirme, après une intro vacillante, nous propulsant  sur des bretelles d’autoroutes saturées de lumière blanche aveuglante (think… ). Mais le sérieux coup de pompe dans les gonades prend forme avec le suivant « Hats Off to Magic », punk-blues sous amphétamine avec son groove saccadé et vicieux : plus entendu un riff exécuté avec autant de sauvagerie depuis 1997, découvrant alors le chaotique « Last Days Boogie » (tiens tiens…) des cryptiques Wormdoom. La suite risque de paraitre un brin plus terne après ce violent shoot d’adrénaline, mais le trio met parfaitement en application ses orientations esthétiques à la croisée des références précitées. La ballade exsangue "Her Blues" s'inscrit en parfait contrepoint, distillant son insidieuse narcose (don't think...).
Parfois plus sauvage, souvent plus propre  qu’Endless Boogie, mais systématiquement ouverts aux charmes des influences erratiques (think... White Hills ???). Des petits gars prometteurs qui s’inscrivent parfaitement dans la grande tradition du rock américain (ou de l'idée qu'on s'en fait, en 2015...).
En attendant, ils envoient une volée de bois vert...


L'Un.

DOMMENGANG :  "Everybody's Boogie" (ThrillJockey. 2015)




samedi 7 novembre 2015

ZU "Cortar Todo" / MOMBU "Niger"




Tiens, on avait récemment parlé de ZU, avec leur lugubre collaboration en compagnie de ce vieux satyre d’Eugene « Oxbow » Robinson, et qu’ils réapparaissent au coin du bois, la bouche en cœur, avec  un nouvel album, laissant les choses à  près là où en était resté le monolithique Carboniferous : à savoir un free-rock en trio (batterie/basse/sax et électroniques embarquées) trempé dans un bain acide de jazz noisy aux structures lourdes et rampantes. Peut-être un poil plus accessible aux oreilles innocentes, si on fait abstraction du grésillement des plages atmosphériques qui font figure d’interludes dérangeants. Tout est relatif, l’ingestion accidentelle de décapant restant une cause d’accident domestique très marginale. Avec ce genre de production, les italiens confirment leur profession de foi et leur appartenance à cette famille improbable des acharnés (Ruins, Keiji Haino, John Zorn, Lightning Bolt…) qui cherchent encore le lien caché entre la note bleue désespérée et le message caché de Black Sabbath dans cette rocailleuse Vallée des Larmes.

Miracle d’internet, on tape « ZU », et on navigue à l’infini, une succession de clics nous amenant cette fois à poser un pied (un seul) sur le continent africain si souvent fantasmé : MOMBU. Soit un autre side-project du saxo de ZU (Luca T. Mai) avec Antonio Zitarelli, batteur de son état, qui s’en vont confronter leurs idées au cœur de la jungle culturelle de l’idée qu’on se fait de la musique africaine. Cliché s’il en est car souvent réduite à sa plus simple expression pulsative. Deux mondes aux antipodes qui se rencontrent, se phagocytent et finissent par fusionner. L’idée originelle était d’intégrer des éléments de transe rythmiques aux figures extrêmes de la musique occidentale, entre free, hardcore et metal. La fusion de genres opposés  n’est pas nouvelle (le parallèle avec les percus tribales/indus de Cut Hands, projet lui aussi parallèle de William Bennett aka Whitehouse est évident), mais peu ont su intégrer à leur musique ces éléments de façon aussi simple,  évidente et duale : le sax baryton pachydermique appuie ses vrilles et syncopes sur le grommellement d’un jeu polyrythmique tout en fûts. Deux univers entrent en résonnance, s’observent et délivrent une énergie primale et vitale au cœur de ténèbres d’un lointain imaginaire…


L'Un.

ZU "Cortar Todo" (Ipecac. 2015)
MOMBU "Niger" (SubSoundRecords. 2013)




by the way... ZU & ODDATTEEE....