mardi 27 mai 2014

Kunsu SHIM : "love"



Plongée réductionniste avec ce coup de cœur halluciné empreint d'un minimalisme absolu  où  la respiration s'efface, le tympan des oreilles aux aguets. La pièce du coréen Kunsu SHIM, interprétée par deux percussionnistes américains (Nick HENNIES et Greg STUART) se nourrit du silence porté entre d’eux. Distance tangente entre les pulsations de peaux insistantes qui se répondent à elles-mêmes, et les crissements étouffés dans un lointain de bruit imaginaire inachevé. Le souffle est diaphane, la proximité martèle dans le vide. On invoquera John CAGE pour la radicalité du propos, Morton FELDMAN pour l'utilisation de l'espace, notre capacité encore intacte à l'émerveillement se charge du reste. 
Et Kunsu SHIM devient passeur.
Je regarde mes deux chats somnoler : putain, plus zen - et décharné - tu meurs (amoureux).


L'Un.


Kunsu SHIM : "Love" (SenufoEditions. 2013).




samedi 10 mai 2014

Hot Dreams de TIMBER TIMBRE vs HAWKS ou pourquoi je n’écrirais pas une chronique digne de ce nom sur deux groupes qui n’ont d’ailleurs rien en commun


Au départ, je ne voulais pas écrire sur ces disques aux styles fort différents et encore moins les opposer. Par flemme, par manque de temps d’autant plus qu’ils avaient déjà eu droit de citer dans ces pages. Mais… snobisme oblige, c’est ce sticker « tttt » de ces ringards de Télérama collé sur le dernier Timber Timbre et placé en tête de gondole chez l’agitateur culturel moribond qui m’aura passablement agacé et décidé du contraire.

Si depuis pas loin de 3-4 ans, le s/t de Timber Timbre, véritable saut de l’ange sans filet, règne altier et sans partage dans ma discothèque, ce n’est pas le suivant « Keep On keeping On » qui aura bousculé la hiérarchie établie malgré les émois de la presse spécialisée. On criait déjà au génie sans oser admettre que ce nouvel opus restait clairement un cran en dessous. Voilà qu’on annonce, tous médias confondus, un nouvel opus au titre racoleur et plein de promesses à hauteur d’entrejambe. Bis repetita : fébrilement attendu comme le nouveau messie et acclamé par tous dans un consensus sans recul, aucun, j’ai l’impression d’être le seul à rester circonspect, le cul entre deux chaises, une chaise musicale dans le vide. Ok ok ok, les 2 ou 3 premiers titres semblent tenir la route dans la lignée directe des albums précédents, mécanique suave trop parfaitement huilée aux entournures à la façon d’une Marque Déposée pour véritablement renouer avec la sorcellerie initiale, combien même l’introductif et vénéneux « Beat the drum slowly » s’inscrit dans la catégorie « coup de maitre » intemporelle. Des ambiances exotiques appuyées voire gainsbaldiennes (!!) tracées au cordeau s’ensuivent  pour hélas très vite tourner en rond; puis on s’emmerde un peu, redite redite et tout est dit. Reste cette voix de sombre crooner de Taylor Kirk qui ne cesse de s’affirmer, et de prendre une ampleur tranquillement inouïe. Du genre à bouffer l’univers tout entier un de ces quatre et l’air de rien.
Le cas des (derniers) rockeurs psychotiques de HAWKS est différent, musiciens n'aspirant nullement à une gloire interplanétaire d'outre-tombe, un succès de niche leur convenant parfaitement. Là aussi la blogosphère semble soudain se réveiller, criant à qui veut l’entendre au génie inespéré depuis la fin rabâchée du Jesus Lizard. Sauf qu’on en est déjà au 4 ou 5° album les gars, hein ?! Bon : absence de titre, l’artwork de la pochette se résumant à une photo de leur local de répèt’, une production à l’équalisation remarquablement plate et dépouillée de tout effet, des titres inédits mélangés à une réinterprétation de morceaux plus anciens confirment cette impression de testament sonore, entre album de la consécration et cadeau pour les fans en forme de demo tape brute. Pourquoi fignoler quand on sait jouer, suer et saigner et embarquer un public de chevelus déjà acquis à sa cause dans une bonne vieille chevauchée virile ? Les HAWKS ne cessent d’enfoncer des portes qui leur ont été déjà grandes ouvertes, quatuor de rêve s’approchant dangereusement  de l’équilibre parfait et toujours aussi enragé.

Au final, si Timber Timbre arrivera tranquillement, album après album, à décrocher le statut envié d'artiste mouille-culotte pour trentenaires urbains consommateurs de produits culturels, Hawks eux se contentent crânement d'être le groupe le plus classe d'un monde en désuétude dans un genre soigneusement ostracisé, sans même faire de pub pour quelconque  marque de bière...
C'est bon parfois, d'écrire une sous-chronique où on ne se fera pas que des amis...

L'Un.

TIMBER TIMBRE : Hot Dreams (FullTimeHobby. 2014)
HAWKS : s/t (Rejuvenation. 2014)