mercredi 28 janvier 2015

James PLOTKIN & Paal NILLSEN-LOVE : Death Rattle

Autant rebondir sur les braises encore chaudes de la chronique précédente : Paal NILLSEN-LOVE derrière ses fûts, est cette fois-ci flanqué du guitariste James PLOTKIN. Le parallèle s’arrête là, tant l’univers proposé diverge de sa collaboration avec YOSHIHIDE, soulignant chez notre batteur cette boulimique curiosité, qui devrait être la marque de tout musicien de jazz contemporain s’il ne veut pas se cantonner au rôle de gardien de la flamme d’un genre souvent trop figé et canonique.  
A l’instar d’un Justin K Broadrick (Godflesh, Jesu…), ou d’un Mick Harris (Scorn),le versatile  James PLOTKIN est issu de cette scène métal expérimentale/«extrême» anglaise du début des années 90’s, qui aura contribué à repousser et redéfinir un cadre jusque-là relativement limité,  avec O.L.D et surtout l’atmosphérique et oppressant KHANATE.
D’entrée de jeu, les arabesques en boucles d'une guitare monolithique saturée d’électronique et sous contrôle martial, donnent la cadence à ce radeau à la dérive sur des eaux noires et profondes. Loin de la joute pyroclastique, la collision se veut latérale plus que frontale, un jeu de batterie tout en reptations intuitives et rituelles s’enroulant autour de l’accumulation de strates vertigineuses  au grain mat et tranchant.
Ces deux-là, s’ils ne se connaissaient pas, ont d’emblée trouvé un terrain de jeu commun, laissant entrevoir de possibles  espaces restés jusqu’ici relativement vierges, à équidistance entre (free) jazz, dark ambient  et noise rock, réinterrogeant à la fois la structure et la texture du geste d’improviser.

L'Un.


James PLOTKIN & Paal NILLSEN-LOVE "Death rattle" (RuneGramofon 2013)

jeudi 15 janvier 2015

Paal NILLSEN-LOVE & Otomo YOSHIHIDE

Paal NILLSEN-LOVE, batteur norvégien de son état, aura confronté le martellement de ses peaux avec toute la fine fleur qui évolue aux confins bâtards du jazz le plus libre et échevelé; que ce soit en solo, en duo (avec Peter Brötzmann, Ken Vandermark ou encore Terrie "EX" Hessels...), et notamment au sein de The THING, power-jazz trio qui n’hésite pas à verser dans la noise au gré des collaborations.
Otomo YOSHIHIDE est une légende, underground s’il en est, dont seul le Japon en a le secret (à l'instar de Keiji Haino, du collectif Boredoms, K.K Null ou Masami Akita - aka Merzbow) . Maniant les platines disque de façon "peu orthodoxe" (=extrême) et l’électronique pointue, tout autant que le manche de guitare, il brasse les styles goulûment, les retranchant le plus souvent dans leurs limites. Ce n’est pas la première fois que les deux acolytes se rencontrent, Otomo Yoshihidé ayant déjà tapé le boeuf avec The THING.
Captation d’un concert à Copenhague en mai 2013, le présent disque voit YOSHIHIDE dépouillé de tout oripeau électronique, guitar-hero assis croisant le fer avec un batteur tendu à l’extrême. Duo et duel flirtent dangereusement pour fusionner dans un déluge de notes chauffées à blanc, poursuivies par une polyrythmie implacable. Certes, il n'y a là rien de bien nouveau dans ce genre de prestation, si ce n’est cet instant du moment de LA rencontre, qui se substitue à la note bleue, et surtout la force de conviction sans faille d'exécutants aguerris, qui régurgitent dans leurs idiomes respectifs, un héritage commun qui a bien dû commencer quelque part entre les délires acidifiés d’Hendrix et l’atypique Interstellar Space de John Coltrane. La petite histoire se poursuivant aussi bien avec Ash-Ra Tempel, un cryptique Rudolph Grey/Blue Humans, Ascension (duo introuvable !) ou encore le Caspar Brötzmann Massaker (fils de Peter...), William Hooker qui jamme avec Thurston "sonic" Moore... Passeurs de relais et maillons d’une chaîne sans fin, NILLSEN-LOVE et YOSHIHIDE, jouent, simplement, et déversent leur trop plein d’énergie dans nos oreilles fertiles encore avides d’excès. Au final, c'est la notion de space-rock qui prendra du plomb dans l’aile, le jazz se voit sérieusement décrassé, et on en arriverait à penser que le rock est  un genre ennuyeux et prévisible.
Simple, radical, et porté par l’inspiration du moment. De ces rencontres telluriques qui peuplent encore le monde de l’improvisation libre (et sauvage).

L'Un


Paal Nillsen-Love & Otomo Yoshihide ((Jvtlandt 2014).

(c'est le seul extrait disponible de leur performance... Très inférieur à la qualité d'enre-
gistrement de l'album)


Otomo et The Thing donc...


(et pour un aperçu du travail pour le moins... RA-DI-CAL de Yoshihide.... )