mardi 16 avril 2019

The Grand Astoria : les dissonances de Black Flag réhabilitées


Dans la catégorie (presque) enviée  « grands petits groupes » qui alimentent la légende,  le Black Flag IIII aura profondément marqué son époque et les légions d’aspirants  hardcoreux des 3 décennies suivantes; de par une certaine forme d’intégrité, l’intensité des prestations chaotiques de ses débuts, mais aussi pour les explorations déroutantes de la suite.
Respect (presque) total (si les reformations et  guerres d‘égo et de succession récentes n’avaient pas tourné au fait divers puéril).
Une énième reprise d’un de leur morceau ne surprendra guère…
S’attaquer à un de leurs albums dans son intégralité un peu plus (!).
Et s’il s’agit de leur EP des plus atypiques (voire controversé) dans leur discographie et interprété qui plus est par un trio de prog-metalheads russes, il faudrait peut-être songer à se pencher dessus.
Les auteurs du forfait  n’auront découvert Black Flag que sur le tard. Peu enclins aux accents punks à

trois accords des débuts mythiques, c’est le tournant dissonant voire instrumental du combo d’Hermosa Beach qui n’aura de cesse de les fasciner. Plus précisément les égarements d’un free-rock psychédélique issus des méandres d’un Greg Ginn alors en pleine mutation mégalomane. Et là se trouve le paradoxe de Black Flag, dont la furie et l’urgence initiales laissent place à des horizons aux structures plus complexes et alambiquées : les fans de la première heure ne s’en sont jamais remis, les historiographes du rock s’en délectant bien au contraire.
Pour the Grand Astoria, pareille influence aura sans doute insufflé beaucoup de liberté et de ce "je ne
sais quoi" (sic) dans leur vision et leur musique ; à accepter l’heureux accident de la fausse note, le tricotage échevelé d’une guitare expiatoire.
La relecture de ces 4 semi-improvisations relève plus d’un hommage sincère enregistré sur le vif que de l’exercice de reprise à proprement parler. L’ensemble reste assez fidèle à l'originel. Peut-être trop pour ce type de morceaux ouverts. C'est très correctement exécuté mais trop appliqué, voire besogneux. Manquent cette spontanéité suspendue, les lourdeurs métronomiques de la frappe de bucheron de Stevenson, et surtout ce grain de guitare inimitable. Difficile aussi d’égaler le morceau éponyme et sa longue introduction erratique d'une guitare hallucinée. Une certaine ironie finale peut poindre avec une mésinterprétation de Southern Rise, le morceau faible de l’avis des russes, qui du coup se l’approprient pour en recracher une version plus aléatoire et jammée sans en perdre l’essence blues…
Anecdotique au final.
Certes.
Et pour ma part une opportunité inespérée de parler d’un groupe qui m’aura accompagné ces 30 dernières années.
.... pour die-hard fans.

L’Un.


The Grand Astoria "the process of weeding out ep" (auto-prod. 2014)