samedi 20 mai 2017

OXBOW : the Thin Black Duke

"cock horse... cock horse... here he comes to fuck you too" (Eugene S. Robinson)


Une trentaine d’années d’existence au compteur, un chanteur-catcheur en slip kangourou, 7 albums racés à cataloguer avec pertes et fracas dans le rayon d’une musique souterraine et iconoclaste. Avec une régularité aussi espacée, on n’y croyait guère plus à cet album en forme de serpent de mer, celui qui ferait suite au discret succès d’estime atteint par le précédent  « A Narcotic Story » paru il y a déjà près une décennie.
Dix ans : une paille pour pareils mammifères en gestation sédative. Une trentaine d’années et pas un des musiciens n’aura changé au sein du quatuor, chacun d’entre eux se contentant d’explorer toujours plus en avant la maitrise brute de  son instrument, à confronter de la sorte sa propre conception de ce qui a du un jour sonner comme le rejeton d’un blues sale et vicié. D’embarquer corps vieillissants et âmes damnées dans le projet au long cours après une escale à rallonge dans la Bay Area.
Avec ce nouvel opus au titre en forme de clin d’œil conceptuel, on ne convoquera certes pas les tensions marécageuses d’un "Serenade in Red", et ne sera réitéré le trip chauffé à blanc, aux limites de la réclusion que nous proposait "An Evil Heat". Pourquoi changer une formule qui aura (presque) permis de gagner en respectabilité avec le précédent ? Même producteur (renommé),  des arrangements aussi impeccables que les coutures d’un costume taillé sur mesure.  L’album est (trop) court, d’une limpidité presque évidente. La recette, édulcorée, reste la même, à faire tournoyer des riffs à la fois simples et hachés sur une rythmique sèche et lascive. Un format de ballades classiques, entre drame sourd et bluette, terrain parfait pour Eugene Robinson : planquée derrière feulements, grognements et lamentations trainardes, sa voix aura gagné en amplitude et tessiture. Parfois plus frontale, d’autres intime et poignante. A croire que son expérience de vaudou foutraque au sein de Left Hand Path (avec Zu) lui aura définitivement fait quitter ses postures de vieux satyre pour de plus philosophiques considérations à peine moins tourmentées.
Toujours, cette quête cachée de respectabilité, un costume de velours aux plis nets. 
L’expérience est plus aseptisée, confortable, à la manière d’une réunion de vieux gentlemen au passé inavouable. Un vernis qui se craquèle cependant derrière toute cette fine retenue : Oxbow reste Oxbow, la menace, rampante, ne fait que retenir ses coups,  le sentiment larvé de démence imminente jamais loin. Saines souffrances.
Toujours pas l’album de la consécration ? Peut-être celui d’une certaine maturité atteinte. Oxbow s’en fout : leur prochain album sortira peut-être après leur retraite, nous laissant toujours le cul dans le caniveau, à moitié-nus et lessivés.
Musique pour (grands) adultes.


L'Un.

OXBOW the Thin Black Duke (HydraHead. 2017)




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