vendredi 21 mars 2025

YOUTH LAGOON : "Rarely I Do Dream"

"On est pas bien là ? À la fraîche, décontractés du gland..."  

 

Poncif de rigueur certes, mais chez Trevor POWERS, l’œuvre produite est viscéralement raccrochée à son parcours. Douloureusement même lorsqu’il a quasiment perdu sa voix suite à une réaction médicamenteuse. Aphone il a laissé les effluves psychédéliques de YOUTH LAGOON en plan pour réactiver sous son patronyme un « Capricorn », instrumental et radical. Ce n’est qu’en 2023 que YOUTH LAGOON revient à la surface avec « Heaven Is a Junkyard », perle noire cathartique et album de la rémission où sa voix fluette revient sur ces moments douloureux. Folk épurée jusqu’à la trame et mélodies oniriques où son clavier feutré occupe la place centrale, Trevor POWERS s’ouvre timidement à de nouveaux horizons pas forcément radieux, un œil rivé dans son rétroviseur. Et « Rarely I Do Dreams » confirme et s’affirme sans pour autant emprunter la même voi(x)e que son prédécesseur. Retour vers le futur assumé qui s’opère sur les chemins poussiéreux de son enfance. Avec l’aide de vieilles bandes de super 8 (ou de VHS) extraites des archives familiales qui viennent nimber d’une patine tendre et nostalgique un songwriting impeccable. Voyage au cœur d’un passé reconstruit aux tonalités chaleureuses qui explique quelque part pourquoi on est là aujourd’hui. Ce qu’on est. Une petite douzaine de chansons déclinées au gré du soleil de l’Idaho et d’une humeur introspective enfin apaisée. La forme éclatée des titres trahit cette appétence retrouvée : de la ballade doucereuse de Football dans les mêmes tonalités que l’album précédent aux ambiances dream-pop espiègle sur Canary, on perçoit même des ambiances shoegaze planer au détour de l’inaugural Neighborhood Scene. Pas vraiment de place pour le superflu ou quelconque temps mort : les vignettes parfaitement calibrées s’enchainent avec une fluidité déconcertante. Si « Heaven is a Junkyard » s’est avéré être le disque de chevet de l’an passé, je sais déjà que ce « Rarely I do Dream » sera ce disque d'apéros rêveurs à regarder le soleil vaciller imperceptiblement dans son verre vide, la vie devant soi.

 

L'Un.

YOUTH LAGOON : "Rarely I Do Dream" (FatPossum. 2025)

mercredi 5 mars 2025

ON FILLMORE : Extended Vacation

Conversation with birds.

 

C’est avec la dernière chronique des schizophrènes de YOU FANTASTIC! qu’on a pu détricoter l’écheveau des filiations ténues post SkinGraft, ce p…. de label. Alors, notre Darin GRAY (ex-DAZZLING KILLMEN ex-BRISE-GLACE ex-YOU-FANTASTIC ou futur GRAND ULENA) quitte ses potes de digressions soniques et le label pour s’acoquiner avec un batteur dont on ne connaissait que la facette la plus commerciale. Si Glenn KOTCHE  officie au sein du groupe de folk (?) rock (?) WILCO, son œuvre solo ou ses diverses collaborations à ses heures perdues dévoilent une appétence très appuyée pour les avant-gardes, qu’elles s’inscrivent dans le jazz ou la musique contemporaine. Après une rencontre hasardeuse sur un projet de Jim O’ROURKE, ON FILLMORE devient une collaboration complice et un projet au long cours : cette respiration longue, nichée dans le croisement des pulsations erratiques d’une contrebasse et d’un vibraphone (ou d’autres percussions délicates) nous embarque sur plus de deux décennies. Digressions oniriques cette fois, nimbées d’un fort potentiel vibratoire et harmonique. Musique de chambre minimaliste aux doux accents de jazz cinématique sur laquelle des esquisses de ritournelles récurrentes se tirent confortablement la bourre tout au long du disque. C’est hanté et gracile ; espiègle aussi avec ces crescendos de tensions bruitistes presque palpables. A classer précieusement entre les musiques de film du ZORN et son acolyte Oren AMBARCHI

 

L'Un.

ON FILLMORE : "Extended Vacation"  (DeadOcean. 2009).