Many times, people think I might be asleep.... but in
fact, I am just listenning to music in my head. I'm always listening... to the
sounds around me... (Pharoah Sanders)
J’avoue ne pas connaitre l’électronique
fouillée et perméable de Floating Points (aka Sam Sheperd), mais pour ce qui
est de Pharoah Sanders, ça relève là du mythe… Dernier compagnon de route du
Trane, « ténor » (ou héraut) d’un jazz aux connotation spirituelles
et syncrétiques dont la bonhomie du personnage achèvera de convaincre le
dernier païen. Rencontre singulière entre ces deux défricheurs introspectifs.
Ce n’est pas un clash de titans et encore moins de style ou de génération.
D’ailleurs on peut laisser les grincheux asséner que Pharoah Sanders, c’était
mieux avant, hein. Certes, mais pendant ce temps, le Pharoah Sanders en
question sortait d’un silence qui aura duré près de deux décennies pour tripper
récemment sur un des albums de Floating Points au gré de ses rêveries
musicales : certains évoluent et se laissent porter par l’air du temps
quand d’autres se complaisent dans la sclérose confortable du clinquant d’un
passé fantasmé (ndlr : pas sûr au passage que beaucoup de grincheux s’enquillent
Tauhid au petit dej’, comme d’autres aiment l’odeur du napalm au petit matin,
mais bon…). Mieux vaut s’affranchir de tout jugement de valeur ou référence
pour simplement laisser notre curiosité ouverte encore intacte s’imprégner de
cette vibration sensible et flottante : leur terrain d’entente se situe
bien au-delà de leurs univers respectifs. Tout commence avec une sorte d’arpège
fragile et délié, flux et reflux d’une même vague qui s’étire. Tel un mantra
interrogateur, son empreinte obsédante marque tous les mouvements de Promises, même
lorsque son absence se fait entendre. On sent poindre les arrangements de
l’orchestre symphonique en contrepoint discret. Sanders lui, pose son ténor avec
des phrasés d’une douceur presque palpable, souffle fragile. L’improvisation se veut sèche plutôt que
fleuve. C’est parfois sa voix qui prend naturellement le relais dans un flot de
petites incantations susurrées et roulées en boules. Pareille humilité dans son
approche trahit quelques décennies de pratique assidue du saxophone mais aussi
un apprentissage prolongé du silence interrogateur. Une belle errance qui se
prolonge au fil de l’eau… Climax, s’il en est, dans les derniers mouvements qui
vous étreignent dramatiquement à la manière d’une bonne vieille B.O des années
70’s flamboyantes… Sérénité d’une petite musique de nuit à mille lieues de la
rumeur hystérique d’un monde actuel plein de faux-fuyants. Une fausse bonne
question globalement inutile serait de savoir si Mozart ou Coltrane auraient eux
aussi participé à ce beau projet au crépuscule de leur vie….
L'Un.
Floating Points & Pharoah Sanders "Promises" (LuakaBop. 2021)
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