dimanche 25 décembre 2022

l'année 2022 du blog en playlist

 C'est peut-être plus facile que de lire les chroniques correspondantes...  Une belle année, beau cru. De belles découvertes...

mercredi 14 décembre 2022

Un best-of 2022 des Energumènes ? Ben y en a pas....

La dernière fois qu’on a glosé sur ce thème, on s’était tout de même fendu d’une petite liste conséquente d’albums recommandables. C’était en 2018…. Depuis un virus chinois est passé par là, faisant oublier quelques tragédies anonymes au milieu de la méditerranée, une chouette guerre pointe son petit museau aux portes d’une Europe anémique et shootée aux hydrocarbures, et pour la première fois dans notre courte histoire, on se dit qu’il n’est pas improbable qu’on ne passe nos étés sur les plages de plus en plus étriquées du Cap Ferret sous des températures moyennes de 50°C. Best-of de l’année écoulée donc ? Alors vous imaginez bien qu’on a d’autres choses à foutre que de se taper un sempiternel récapitulatif d’une année pourtant révolue, ce rapide coup d’œil en arrière à peu près aussi indigeste que la dinde aux marrons repassée d’un repas de noël dysfonctionnel. Figure de style rituel rassurant ou exercice consacré des webzines moribonds, pour notre part on va rester dans notre zone de confort, en embuscade, et éviter consciencieusement un best-of maigrelet au vu du nombre insignifiant de chroniques qu’on est à peine capable de pondre annuellement. Exercice de rattrapage light donc, avec 2 albums, deux seulement, qui méritent quelques lignes et toute notre attention (et votre compréhension).Et bonnes agapes !

 

On tient peut-être là le dernier de la série des live de CAN méticuleusement réédités par Spoon Records (le label d’Irmin Schmidt, dernier survivant du quatuor mythique qui coulent de beaux jours dans le sud de la France). Il est vrai que le collectif enregistrait de façon systématique toutes ses performances, et sessions de répétitions (ce qui nous avait déjà donné le fabuleux coffret des Lost Tapes). A la différence des albums live précédents (Stuttgart et Brighton), ce Cuxhaven est présenté dans un format plutôt ramassé, la captation tenant sur un seul disque (pour une trentaine de minutes). Sans chanteur, cette période de concert surfait sur de longues improvisations erratiques, vaguement tricotées à partir de thèmes récurrents et offrait la part belle à des moments paroxystiques, points d’orgues nécessaires pour entretenir la tension. Ici, point de réelles envolées, mais plutôt une de ces pulsations métronomiques si chère à Jaki Liebezeit qui emmène les autres membres du groupe dans un jam continuel, sorte de swing cosmique et funky aux vertus hypnotiques. Quatre pistes presque trop courtes, amputées des climax paroxystiques auxquels nous avaient habitués les 2 live précédents. Pour la montée d’adrénaline, il faudra compter sur la piste Drei qui nous embarque dans un tourbillon d’accélérations soutenues, cavalcade héroïque d’un quatuor en totale symbiose. Par moment, on retrouve de vagues accents de ce qu’on dû être les transes collectives de Tago Mago, en plus accessible… Car si les deux précédents sont plutôt orientés pour les fans hardcore du groupe (et rassurez-vous : il y en a), celui-ci avec ses rythmes chaloupés et réguliers plaira à un plus large public. Après… pas sûr non plus que ce soit la meilleure porte d’entrée pour les primo arrivant dans l’univers contrasté et passionnant du CAN….

 

D’Arooj Aftab, je ne connais pas grand-chose. Ce que je sais en revanche c’est que son Vulture Prince n’a pas cessé de tourner sur ma platine durant ces derniers mois, bouée de sauvetage et havre de paix sur la fameuse île déserte. Alors si vous êtes toujours en quête d’un best-of au fil de ces lignes, pour ma part, il se limiterait amplement à cet unique album qui surpasse à peu près tout ce que mes oreilles ont pu découvrir en 2022 (sauf les albums et artistes chroniqués, cela va sans dire…). En conjuguant néo-classicisme, ambient minimaliste et une grande part de tradition soufie, Arooj Aftab fait un splendide saut dans le vide en forme de grand écart intimiste. Offrant une musique profondément apaisée et introspective, nappée d’un sombre velours flottant, la musique se transcende ici à tutoyer les éthers en eaux profondes. A l’exception d’un tubesque Last Night en forme de reggae acoustique, Arooj va abondement puiser dans ses racines du sous-continent indien, où la poésie métaphysique est empreinte d’une mélancolie suave. Parfait pour méditer et prendre de la hauteur sur une année 2023 qui s’annonce déjà tumultueuse…

 

 

L'Un. 

 

CAN "live in Cuxhaven 1976" (Spoon. 2022)

Arooj AFTAB "Vulture Prince" (Verve. 2022) 

 

 

 

 

lundi 5 décembre 2022

Matt BALL "Amplified Guitar"

 "sweating the blues" (R. Ward)

 

Top ! Je suis plus connu pour être guitariste au sein de Big Brave combo radical d’inspiration métal pas vraiment connu mais réputé pour un rapport physique et massif au son mon présent effort en solo très judicieusement titré Amplified Guitar a été signé par les ténébreux du label Southern Lord connu lui pour agréger tout ce qui se fait de plus extrême quelque part entre le doom le drone, je suis-je suis ……???

- ……

- Matt Ball.

Ah ok, c’est bon c’est bon, merci Julien. Avec ton don inné pour nous coller tes énigmes à la con on a là suffisamment d’informations pour appréhender ce petit brulot sonore tout en électrique introspection. Mais Amplified Guitar vaut mieux qu’une simple tirade de télé. Cet album nous raconte cette histoire simple et ancestrale, celle du chemin parcouru par l’électricité, des doigts pressés sur les cordes en passant par le câble jusqu’au haut-parleur (potar réglé sur 11…). Il nous parle de ce point de rupture, lorsque l’électrification prend le dessus sur l’instrument. Matthieu Ball joue avec les feedbacks d’une guitare atypique et préparée. C’est son truc, comme d’autres se sustentent avec des parties de sudoku effrénées dans le métro blême… Sauf qu’avec sa maitrise à la fois intuitive et réfléchie, il érige cette pratique forcenée au rang d’art et d’ascèse sonore. Il y a souvent au détour de cette avalanche de larsen empilés un semblant de notes égrenées ou de vagues échos d’harmonies vite étouffés. Des airs viciés de folk aux accents d’une americana souffreteuse et désolée ; comme si Neil Young avalait son manche de guitare en entendant le Metal Machine Music de notre célèbre nain mortifère  (enfin Lou Reed quoi…) pour la première fois. Une aridité qui rapproche plutôt des errances d’un Dylan Carson (Earth), sauf que la musique de ce dernier traverse l’espace alors que Matt Ball est plus prompt à saturer ce même espace en travaillant sa matière de la sorte. Son rapport physique au son est viscéralement chevillé au corps et introspectif, grand mystique qui s’ignore et colle sans le savoir à cette sphéricité du son si chère à Giacinto Scelsi. Des morceaux à la fois puissants et intimistes, presque timides, lanternes sombres jetées dans une mer d’huile avant que ce travail de mise en boucle d’une énergie brute ne devienne cet océan de son en perpétuelle expansion. Un peu comme la colonne d’air des saxos de Borbetomagus qui remplissaient les bars dans lesquels ils sévissaient de leurs décibels indomptés : chaque époque à ses doux fêlés, pèlerins sans bâtons et autres activistes d’un son radicalisé. Et Matt Ball ne fait que perpétuer cette tradition de potaches jusqu’au boutistes du bruit blanc.

 

L'Un.

Matt Ball "Amplified Guitar (SouthernLord. 2022)