"The nigga in me is me" (Soul Glo)
SOUL GLO ? c’est la réponse en
forme de douche froide et joyeusement furieuse à l’assertion que le hardcore
est un genre moribond, qui verse trop souvent dans l’auto-complaisance et
l’excès de testostérones. Ce quartet de Philadelphie prouve qu’on peut
continuer de prendre des directions déviantes, avec une bonne
dose d’auto-dérision en laissant le gros melon souvent de rigueur de côté.
Le quartet de Philadelphie qui vient de signer son petit dernier Diaspora
Problem autoproduit sur Epitaph, n’a pas pour autant baissé la garde ou poli
les rugosités de son propos. Hardcore de combat, combat de rue : le groupe
nous balance une poignée de petits brulots revendicatifs ultra vénères.
Cavalcade de morceaux qui s’enchainent sur un rythme effréné, avec des breaks
ultra-rapides : Jump !! (or get Jumped) en est la parfaite
illustration. Le mid-tempo, rare, prend la forme d’un hip hop bâtard et
lancinant (Driponomics) ou du troublant Spiritual Level of Gang Shit qui
oscille entre un groove paresseux et des blast beats à couilles rabattues…. Un
niveau de folie rageuse rarement atteint qui propulse ce Diaspora bien au-delà
de l’urgence qui caractérise souvent le punk hardcore; lorsqu’il est de
bonne facture…. La scansion sur-vitaminée et parfaitement inintelligible de Pierce
Jordan ne sont certainement pas étrangères à ce sentiment d’hystérie permanente
qui transperce l’album de part et d’autre. Avec une production sous-pressée et leur attitude DIY irréprochable, SOUL GLO me rappelle cette effervescence des débuts
du HxC américain ; le groupe n’aurait pas fait tache dans le catalogue
du label Dischord… D’ailleurs, une comparaison rapide et facile s’impose avec
les mythiques Bad Brains… Pour la rapidité d’exécution et la démence du frontman,
peut-être, mais certainement pas pour la poignée de spliffs, le trip Jah-love
et son corollaire de propos homophobes… Parce que SOUL GLO est plutôt un groupe
concerné et malheureusement bien en phase avec le triste constat de son époque. Affligé, quand
près d’un siècle de mouvement de lutte pour les droits civiques se termine en
queue de poisson dans le marécage fangeux d’un trumpisme à tête de bison décomplexé. Les
combats à mener sont multiples, surtout lorsqu’on appartient à la communauté
afro-américaine. Au passage, le groupe n’oubliera pas d’embarquer la gent
féminine dans ses vitupérations (avec entre autre Mother Maryrosesur, Dj BEARCAT….). Engagé ou enragé, pour continuer à porter haut et fort (et légèrement dissonant) la voix
de toute sa communauté. Moins hype et poseur que des trucs boursouflés comme
Death Grips, moins bizarroïdes que les furieux de Ho99o9, Soul Glo a opté pour
une direction qui s’inscrit dans une tradition punk plus classique mais avec
une sincérité et une fougue qui les positionne déjà dans la catégorie de ces
grands petits groupes qui ont d'ores et déjà une influence certaine sur leurs
pairs, mais peu de visibilité auprès d’un public, même initié, car trop souvent gavé aux productions à peau blanche et sous stéroïdes… Mais nul n’est
prophète en son pays.
L'Un.
SOUL GLO : "Diaspora Problem (Epitaph. 2022)
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