(avant ?) dernier post de l'année (pour
l'Un du moins) avec un de ces groupes en forme de vis sans fin qui
viennent (enfin) de sortir leur petit dernier tant attendu. Et
sobrement nommé « IV »... parce que le trio sort là son
4° opus, la belle affaire. Vis sans fin parce qu'il fait suite
contre toute attente à l'excellent « Another Sound is Dying »
en apparence sans issue en radicalisant toujours un peu plus la
direction prise par ce dernier. D'ici... on est loin de leur discret
premier album en somme.
Les new-yorkais de Dub Trio n'avaient
au départ de nom ni de projet précis, sorte de jam session de trois
« requins de studio », qui mettent régulièrement leurs
talents respectifs au service de grosses pointures (50 Cent, MosDef
ou encore les Fugees), ou live avec Mike Patton's Peepin' Tom ou
Matisyahu...
Au départ certes, ils exécutaient un
dub de bonne facture, si bien que le restaurant où ils se
produisaient un soir a marqué sur les affiches... DUB TRIO. Et le
nom est resté. On à peine à imaginer la suite si leur musique
relevait du flamenco à l'époque...
Virtuoses en quête de sensations,
stagner dans un style même ouvert ne suffisait pas à étancher leur
soif d'exploration. S'est alors graduellement injectée au fil des
albums une dose massive d'un rock tendance dure, qu'il soit punk,
métal ou dissonant. Immédiatement, on pense Bill LASWELL, Maître
des infra-basses ouvert aux rencontres improbables, voire les
retranchements les plus atmosphériques du Painkiller de John Zorn
(et Laswell, mais nos 3 gars s'en défendent. Pourrait alors
s'établir une filiation plus lointaine avec le rastacore
séminal des Bad Brains ou plutôt... Blind Idiot God (fallait la
sortir cette référence !), groupe oublié des années glorieuses du
label SST, et certainement le plus proche de la démarche du Trio.
Mais là aussi les petits gars ne les ont découvert que sur le tard.
Noise-dub-rock donc, banale
musique crossover comme on en
pond au kilomètre sous nos latitudes fanées, et
l'affaire aurait pu en rester là.
Mais si la dichotomie entre les genres
était encore palpable avec l'audacieux « Another Sound is
Dying » sorti chez Ipecac en 2008, les pistes sont brouillées
à l'envi et une véritable hybridation opère avec le présent
« IV ». Sans se la jouer «Dub Trio le retour et on
va faire encore plus balaise », ils ont au contraire
exactement pris le chemin de la tangente.
De dub, il n'en reste que
l'essentiel : une technique. Car c'est ce qu'est le dub
avant de le limiter trop directement au soleil de la Jamaïque, en
frère prodigue du reggae : surenchère d'effets spatiaux, phasing
et la table de mixage comme instrument à part entière (avec les
papattes de Joel Hamilton – Blackroc, Blood of heroes, Unsane -
derrière les manettes)...
Du metal, n'en reste qu'une
épure aussi : le son gras de la guitare, la basse à la fois
rocailleuse et ronflante, de puissantes syncopes et accélérations
mesurées au cordeau. Ensemble lourd et massif, tournoyant sur
lui-même comme The Melvins savent faire, et finement ciselé comme
DUB TRIO aime à le faire. Une bonne moitié des morceaux de l'album
(notamment « Control Issues... » ou « Words »)
insèrent insidieusement le squelette d'un dub qui se confond
en échos, rappel distant et minimaliste des influences fondatrices
du groupe.
Seuls morceaux à s'abstraire du pack
sont le dubstep sautillant de« Ends Justify Means »,
clin d'oeil amusé ou signe de la future mutation déjà en gestation
(?), tandis que l'interlud-ique
« 1:1.618 » et ses séquences de piano foutraque
intéresserait peut-être un certain John Cage s'il avait un tant
soit peu versé dans la musique dite populaire.
On tient là un solide album de rock
instrumental et éminemment technique qu'une certaine froideur quasi
mécanique pourrait rendre rédhibitoire si la compacité radicale de
l'ensemble ne venait gommer tout ça de quelques pulsations de basse plombée. Ce n'est pas
nécessairement une quête d'originalité à tout prix qu'on
encensera ici, mais une démarche méthodique et curieuse en forme
d'évidence, rendant le groupe d'autant plus sympathique. A peine
écouté le présent petit dernier, on leur demanderait déjà de
nous pondre une suite, et tout de suite, histoire de voir un peu, toujours un peu plus.
Can't wait, can't wait...
L'Un
DUB TRIO : « IV » (Roir. 2011)
du son et des vidéos sur leur site.
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