vendredi 27 juin 2025

NURSE WITH WOUND - SCANNER "Contrary Motion"

 Rencontre du 3° type.


« Fantôme élégant » (sic) de la scène expérimentale, Steven STAPLETON (aka NURSE WITH WOUND donc) n’a jamais renâclé à croiser le fer avec ses pairs obscurs. Mais une collaboration avec Robin RIMBAUD (aka SCANNER, ectoplasme des ondes courtes et flâneur électronique) peut étonner tant les univers respectifs coexistent depuis des lustres sur des trajectoires strictement parallèles. Mais ainsi se font les rencontres et se forgent les sympathies. Ça faisait longtemps qu’ils échangeaient sur l’art, la musique et la philo, alors quoi de plus logique que de traverser le pont stylistique qui les séparait encore : parce que la musique ne se borne pas à des étiquettes et des catégories étriquées, capable, dans ce Contrary Motion, de s’agglomérer, pour déboucher sur ces petits écosystèmes sonores au trouble inouï. Le substrat est fourni par STAPLETON, soit une heure de ses masses électroacoustiques verticales (tout droit sorties de son chapeau) que SCANNER peut s’approprier en toute liberté avec ses parasitages de fréquences radios, voix de l’éther et autres sons collectés au fil des années. Perce même parfois le chant des oiseaux, discrètement occulté par les cliquetis métalliques de ce Golem organique tapi dans nos strates inconscientes. La Bête ainsi modelée impose sa respiration d’harmoniques rampantes et de fines pulsations. Lent panoramique amniotique aux relents industriels dont la luminosité opaque ne cesse de se renforcer au gré des mouvements contraires. Ambient music insécure qui disperse son hypnose insidieuse par les canaux mycorhiziens enterrés sous nos pieds. A dose homéopathique, il en va de soi.

 

L'Un.

 

NURSE WITH WOUND - SCANNER "Contrary Motion" (Alltagsmusik / United Dairies. 2025)

 

jeudi 5 juin 2025

DIVIDE AND DISSOLVE " Insatiable"

 « J'ai vu des gens commettre de grands actes de mal sans jamais être heureux, et des gens commettre de grands actes d'amour, toujours heureux » (Takiaya Reed guitariste de D//D)


 Et c’est toujours la même antienne : mais comment peut-on passer à côté d’un truc aussi essentiel des années durant ? Chemin de croix de faux derche et papissam habemus de rigueur, sur le chemin de la repentance. DIVIDE & DISSOLVE : tout un programme derrière ce nom. Austère et vaguement menaçant. Depuis presque une dizaine d’année, les deux  musiciennes aux origines afro-indienne et maori s’adonnent à la pratique d’un doom sec et minimaliste, débarrassé de tout le folklore occulte pour se concentrer sur la puissance brute et expiatoire du son. Insatiable donc, avec ce goût amer de requiem qui invite l’auditeur à ressentir tout le poids des oppressions passées et de tous les combats à venir ; celui de toutes les minorités. Une dizaine d’histoires sans paroles comme autant d’accusations à charge libératoires qui nous mettent dos au mur du son, sans lamentations aucunes. Depuis l'introductif « Basic » (2017) le son de DIVIDE & DISSOLVE s'est étoffé, délaissant ce côté sourd et rampant d'un duo doom brut de décoffrage pour une matière de plus aérée, entrecoupée d'interludes orchestraux. L’introductif « Hegemonic » distille de fragiles fragments aux accents hachés de liturgie profane avant de céder la place au culte d'une guitare fougueuse tout en aplats granuleux et de la batterie lentement et lourdement martelée. Des cathédrales s'effondrent sous le poids de leurs assauts, quand point au loin une inquiète lueur de bienveillance... Cette mise en tension viscérale rythme l'enchainement des morceaux et le propos sous-jacent qui oscille entre colère, destruction et compassion. Parce qu’au final, la seule libération possible, on l’a ancrée au plus profond des tripes. DIVIDE & DISSOLVE ? C’est un peu SUNN O))) qui rencontre EARTH, mais avec un message mutique éminemment politique à transmettre haut et fort. 

  

L'Un.

DIVIDE AND DISSOLVE "Insatiable" (BellaUNion. 2025)