Spleen & malaise vagal.
Oui : « Le rock
c’est un truc mort » m’avait asséné un gommeux sympa sous
drogue de synthèse lors d’une pseudo rave de bourgeois de province improvisée
au bord d’une rivière. Bah oui ma bonne dame, à force d’annonces putes et
creuses, ça fait déjà un paquet de temps que les Dominique Seux de la presse
musicale nous ont rivé dans le crâne leurs prophéties au rabais devenues depuis
certitudes mastoc. Et ça fait un paquet de temps qu’on s’évertue à chercher le
lapin blanc messianique dans un paysage à la surface de plus en plus morne.
Poliment lissée. Calibrée. Alors la majorité silencieuse et hagarde ronge son
frein en guettant le moindre pet foireux des méga-stars bouffies d’auto-suffisance
qui tournent en boucle dans leur entre-soi has been. Mais le genre est
polymorphe et sait revenir par ces brèches interstitielles là où on ne
l’attendait pas. Parce que MOIN, c’est pas du rock. Enfin pas pour la
majorité hagarde et silencieuse (et une bonne partie des autres). Surtout si on
considère que deux des musiciens distillent une électro pointue avec leur
projet RAIME. Pas vraiment dans les canons figés du genre, non. Point de guitar
hero, nenni. Mais au moins on a une guitare. A la traine certes avec ses
accords clairs égrenés en boucles paresseuses ; mais c’est une bonne base. Et
une batterie. Discrètement virtuose, mate et jamais binaire (Valentina
Magaletti infuse son art des polyrythmies complexes au sein des étonnants VANISHING
TWIN). Avec ces deux instruments mis bout à bout on peut commencer à
voir se profiler les contours d’un objet (avant-)rock complexe. Le trio s’arme
d’une poignée d’invités derrière un micro monocorde comme pour mieux décliner
le spleen ambiant en autant de vignettes de l’ordinaire désabusé. Ok : MOIN a
dû éclore un de ces jours chargé de smog londonien, à charrier de la sorte toute
cette morosité larvée au cœur de chaque morceau. Avec ces accents austères
dignes de la Réforme un parallèle sympathique s’effectue d’emblée avec l’ironie
contemporaine de leurs compatriotes de DRY
CLEANING ou le réductionnisme obstiné de DISAPPEARS : tous ces moines
soldats du rock qui reculent discrètement certaines limites tout en humant
l’air lourd du temps. Mais MOIN à choisi la voie la plus discrètement décharnée avec trois bouts de post-rock, quelques filaments de noise-rock, des filigranes
électro et le moins d’effets de manche possible. Ouais le rock est mort,
c’est pas du rock. Et c’est très bien comme ça.
L'Un..
MOIN : You Never End (AD93. 2024)
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