Berrocal, Jac(ques), c’est une longue page
gribouillée de la musique improvisée en effervescence durant les années 70’s, où les
acolytes et partenaires en crime d’alors se jouaient des styles et des
frontières. L’impulsion du jazz qui se heurte à la noise d’un punk bancal.
Riverdog, c’est 2 minots du Minnesota épris de toutes les musiques de traverse
accumulées depuis ces dernières décennies, avec une forte inclinaison au DIY et
l’irrévérence. La transition générationnelle est assurée. La légende prétend
que la rencontre entre ces deux mondes à eux trois fut spontanée, la décision
d’en faire quelque chose tout aussi rapide. En fait, Berrocal, a simplement
contacté les deux gugusses, favorablement impressionné par leur travail. Fallen Chrome, c'est cette rencontre tellurique où l’exploration inouïe semble être le
maître-mot de ce disque. Les rythmes se concassent, des échos sombres et
puissants de paysages perdus trainent en arrière-plan et enlacent la poésie brute
et incantatoire de Berrocal. Sa trompette, toute en échos rêveurs, traverse un
brouillard analogique qui s’étire en particules ciselées. Chaque morceau offre
une face différente d’un prisme orienté vers un ailleurs encore indompté. Un disque de défricheur, de passionné en recherche
permanente de ces univers sonores connexes et complexes, dont la beauté
fulgurante effleure nos sens affûtés.
Le monde du jazz s’interroge souvent très sérieusement sur
le sens de ce genre musical alors majeur jadis, et qui semble maintenant tiraillé
entre les gardiens de la flamme et de la note bleue, et de timides
acoquinements avec la modernité protéiforme. Avec ce genre de trop rare objet musical non identifié
on tient une possible réponse, évasive et salutairement insaisissable…
L'Un.
Jac BERROCAL & RIVERDOG "FALLEN CHROME" (NATO. 2021)