lundi 1 juin 2015

MANINKARI : "L'océan rêve dans sa loisiveté"



« Sous le monde réel il existe un monde idéal qui se montre resplendissant à l’œil de ceux que des méditations graves ont accoutumés à voir dans les choses plus que les choses » - (Victor Hugo. 1822)

Maninkari, est le projet de deux frères, dont la démarche doit se situer quelque part à la tangente de la quadrature du cercle. L’instrumentarium inusité sous nos latitudes, relève plus du Voyage en Orient  que  de la Conquête de l’Ouest : cymbalum, santoor, zurna…. dont la transposition géographique tracerait une ligne toute en courbes et volutes sur le sable d’une des routes de la soie; un bodhran (percussion celtique) donne le tempo  et le point de départ. Musique  de déroutes et d’échos lointains dont la rigueur formelle pourrait être la réponse acoustique (et apolitique) à l’electro-indus furieusement orientalisante de feu Muslimgauze : de courtes séquences musicales  mises en boucles,  enveloppées par la richesse  harmonique insoupçonnée des martellements du bodhran. Le timbre connoté des autres  instruments et le caractère modal des mélopées confirment la trajectoire empruntée : going East….  Une production à la fois sobre, sèche, et tout en réverbérations que l’on se plait à imaginer naturelles, entretient ce climat d’étrangeté et cette sensation de profondeur flottante qui ne nous lâchera pas. Musique cinématique s’il en est, mais celle d’un film sans pellicule, où les images mentales générées se confrontent aux mille et un chemins de traverses empruntés sur les chemins de sable et de sang s’effaçant derrière nos pas. Une ascèse stricte se définit dans les poussières d’échos lointains de cette beauté sombre. Grinçant appel au voyage résonant comme de suaves promesses non tenues susurrées à notre oreille. Il y a une angoisse sourde qui point en filigranes dans l(‘)oisiveté de cette musique nimbée de mystères, lancinante comme un rêve récurrent à la sensualité frémissante, occultant l’espace intérieur qui l’entoure.

 « On frappe à ma porte et j’entends le vent des oiseaux »

L'Un. 


MANINKARI : "L'océan rêve dans sa loisiveté" (three:four records. 2014)





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