Lorsqu’à la première écoute d’un disque on commence flanquer des épithètes dans tous les sens, à lui trouver pleins d’analogies avec d’autres illustres artistes, c’est peut-être précisément qu’on tient là un album qui ne ressemble qu’à lui-même, qui en rien ne mérite qu’on lui accole le petit qualificatif putassier qui rangera sagement l’ovni dans une catégorie pré-mâchée pour le bonheur bonheur du consommateur compulsif de musique au gigaoctet…
En fait, on ne parle même pas de rock ici, mais on déroule nappes, ambiances et climats, comme d’autres font la pluie et le beau temps pendant un avis de tempête. Ample trio de musique instrumentale dont les seules voix parcourues proviennent d’enregistrements glanés sur le fil tendu de rencontres, les Oiseaux Tempête pratiquent l’art consommé de la nuance en demi teintes comme une plongée toute en retenue dans l’œil du cyclone. Longs arpèges de guitares grises. Les morceaux prennent le temps de se poser dans un temps cotonneux qui s’étire. La basse entretient les braises. Quelques touches de field recording qui ancrent un propos sombre et tendu dans une réalité à fleur de peau. On essuie un grain à prudente distance entre de longues accalmies. Ce goût de requiem aussi fragile qu’un obsessionnel battement d’ailes. Echos crépusculaires. Invitation au voyage désabusé vers des zones insoupçonnées de notre conscience résiduelle. Il y a là dessous un discret concept, éminemment social et politique, qui donne le cap à cette équipée. Comme une colère sourde nourrie de ces drames silencieux dont le trio rend compte, passeur de témoin et flâneur aguerri aux déroutes d’un monde occidental vacillant, le notre. Ambition simple de nous narrer l’histoire d’un temps arrêté qui s’écoule sur des existences de bas-côté plombées. De l’art et la manière d’accoucher de la bande-son poignante de notre splendide déconfiture sociale shootée en plein vol.
L'Un
OISEAUX TEMPETE : s/t (SubRosa. 2013)
OISEAUX TEMPETE : s/t (SubRosa. 2013)
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