Mais quel con.
Un verre de vin dans la main pour éviter que les bras m’en tombent, le disque passe dans les enceintes chez un pote, et je reste là à me demander comment on peut passer à côté de ce truc monolithique et abrasif à l’époque de sa sortie. On mettra ça sur le compte de mini-enceintes d’ordi. faiblardes. Plus trop le choix pour dormir la conscience tranquille (et arrêter de se repasser ce Golem en boucle dans la piaule) : plonger les mains dans les vitupérations d'un smegma hurlant qui exhale un lourd parfum coupable de tous les excès noiseux des années 90’s.
Avec 6 ou 7 albums au compteur, les 6 ou 7 loustics de Hey Colossus ne font pas précisément figure de « nouvelle sensation du moment » si chère aux médias britanniques que je croyais tout juste bons à enfoncer des manches à balai dans le fondement de la pop (au moins sait-on maintenant qui les enlève). Cette persistance qui relève de l’acharnement forcené commence à payer, ce fantasque « Cuckoo live life like cuckoo » les extrayant (à peine) de cet anonymat de rigueur qui sied tant à pléthore d’aspirants bruitistes : on est passé là de la chape stoner-doom plombée des débuts, à un truc tout aussi lourd, vicieux et hypnotique, une vague coloration psyché-bluesy rendant l’ensemble plus fréquentable. D’emblée Hot Grave balance un groove opiniâtre martelé, tandis que l’air se raréfie sous la casquette du chanteur possédé. Une prise en main ferme, par les testicules, dans un mouvement de torsion lent et progressif. On régurgite sa bile, alors qu’ « Okktave Dokkter » ralentit encore la charge avec un riff de basse à la Shellac tournoyant au milieu des nappes de voix et de synthés englués. Si la suite se perd dans une rythmique psychédélique de plus en plus appuyée (dérangeant contrepoint vocal sur « How to tell time with Jesus »), le dernier « English Flesh » nous offre le privilège du spectacle de notre triste délivrance comme une descente sans fin et faussement apaisée en forme de requiem cosmique.
Pas tous les jours en ces temps de mornes plaintes prédigérées qu’on a l’occasion de se prendre une bonne giclée vicieuse et hallucinée d’un rock pouilleux à l’excès, à équidistance avec Penthouse, les Swans et the Oxbow qui auraient bouffé tout cru du pâle Wooden Shjips au petit déj’ : « Careful with that axe, Eugene »…
L'Un
HEY COLOSSUS "Cuckoo live life like cuckoo" (MIE. 2013)
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