Un
soir de novembre 2004, au coin d’une table avant un concert de Fly Pan Am, et après
quelques échanges sur un peu tout, avec les deux guitaristes (Roger aussi
membre de God Speed You ! Black Emperor et Jonathan, le rire facile et le
sérieux mêlés), nous avons décidé de poursuivre notre conversation en
loge ; ce qui était au départ une interview est devenu ce qui suit, au propos toujours d'actualité :
L'Autre Energumène, Shoï :
profitons de la francophonie pour parler de la dualité existante au Canada, de
plus en plus forte, car elle a du mal à trouver sa voie ( « voix »),
à être pleinement mêlée à la vie canadienne.
Jonathan :
sexuel en même temps ! mais de moins en moins car il y a de moins en moins
de choses à défendre.Le problème de la langue, c’est le problème des lois qui
ont été créées sans observer la recherche d’identité ; on ne cherche pas à
protéger la langue mais les lois qui protègent la langue. Et il y a une
difficulté à être francophone au Canada car on est confrontés à des lois
linguistiques.
Roger :
oui, surtout qu’à Montréal il y a une intégration qui se fait entre les
francophones et les anglophones : il y a bon nombre d’anglophones qui
viennent d’un peu partout, qui ont grandis dans une culture sans apprendre le
français et qui devraient, s’ils voulaient s’intégrer parler français. Il y des
anglophones au Québec qui s’y sont adapté autant que les francophones
s’adaptent à l’anglais dans le reste du Canada. Donc il y a un peu moins dans
la vie de tous les jours, dépendant des milieux sociaux, de rapprochements.
Ça ne va pas à l’encontre de ce qu’il disait, c’est juste très complexe.
J :
Il y a toute une génération qui est plus la nôtre, qui a découvert que le
bilinguisme n’était pas du tout un rapport de parler-écoute ; mais il y a
aussi une tension qui disparaît dans la communication car on se rend compte
qu’il y a une notion de partage de la culture, d’apprendre des deux
côtés ; et la part de gêne, de peur de ne pas comprendre surtout de la
part des anglophones disparaît. Et quelque chose de significatif, c’est qu’avec
les copains à Montréal je parle français, et ils répondent en anglais et le
dialogue se créé.
R :comme
le bassiste dans le groupe est anglophone. Il parle en français, je répond
anglais et il parle anglais je répond en français !
S :
dans le milieu musical, il y a une osmose qui est plus facile à réaliser ?
est ce plus naturel d’utiliser les 2 langues ?
J :
Montréal, c’est un village de 2 millions d’habitants.
S :
c’est une série de petits villages qui n’en forment qu’un.
R :
oui c’est assez difficile à croire.
J :
c’est fréquenté, et il n’y a personne qui participe à la vie. Je ne suis pas
déçu, ni surpris, mais je me rend compte que c’est long, les débats sur la
langue dans un pays vaste comme le Canada. Je suis amer par rapport au
Luxembourg où il y a des gens qui parlent 4 langues. Ils sont ouverts à la
culture. Les Québécois et les Canadiens ont tant de tensions.
S :
c’est une focalisation.
R :
oui, c’est immature, comme de jouer avec un hochet. (Jonathan secoue la tête,
peiné) c’est trop loin…
S :
c’est aussi focaliser pour oublier d’autres problèmes plus importants à côté,
notamment politiques.
J :
comme les relations avec les Etats-Unis par exemple ; dans les centres
urbains, les militants canadiens ont une
certaine béatitude dans leur côté anti-américain ; c’est se reposer sur
ses lauriers, ne pas se positionner dans un sens critique ; je ne sens pas
qu’il y ait de sentiment national canadien, comme il a pu y avoir un sentiment
québécois du temps des embrouilles.
S :
et on est plus au temps du nationalisme, de la sauvegarde de l’ethnie.
J :
surtout pas au Québec ! on rempli même pas nos cotas ethniques, car on a
élaboré un système économique qui fait que si tu n’as pas le bulletin de
25 000 $, que tu sois francophone ou non, c’est fini la musique. C’est une
petite ville Otawa qui dirige toute la paperasse d’un des pays qui a la plus
grande superficie au monde. Comment comprendre les problèmes de tous, d’un état
à l’autre ? ils nous demandent d’avoir une identité culturelle mais on a
peur d’avoir déjà une identité nationale, c’est politique.
R :
de toute façon, qui peut placer sur une carte le nouveau Bronswick ? on
est allé en Turquie, et dans l’avion il y avait CNN ! CNN Turquie, on se
base sur CNN pour informer !
J :
si c’est ça pour nous la culture, ça veut dire quoi ? qu’il faut
saccager ?
S :
c’est vulgariser dans le mauvais sens du terme : on uniformise en créant
des filiales pour la façade, et pour permettre de transmettre un discours
orienté ; c’est une invasion, une autre colonisation.
R :
oui et plus pernicieuse…
S :
pour revenir au groupe, vous utilisez plus la parole dans votre dernier album ;
vous avez plus de choses à dire ?
R :
on a toujours eu beaucoup de choses à dire, mais on n’avait pas l’expérience
pour savoir l’exprimer. Le premier album parlait essentiellement de poésie.
Maintenant il y a plus d’intérêt à mélanger des idées. Il y a toujours eu une
volonté de parole, de dire quelque chose mais on essayait tellement de
synthétiser une idées qui était énorme qu’on se retrouvait avec un titre
illisible. C’était tant chargé qu’on se demandait si la synthèse serait
comprise. Même si c’est quelque chose qui ne me dérange pas que l’on ne me
comprenne pas complètement : j’aime que les choses restent ouvertes.
J :
ça a toujours été un travail sur l’interprétation ; en même temps si on
croit l’interprétation, c’est radicalement subjectif dans la pensée. Ce n’est
pas juste un souci de soi, un souci de choquer, c’est aussi un respect. Je
déteste entendre « c’est facile l’abstraction, c’est facile la poésie,
tout le monde peut faire ça » ; cet argument est celui du geste et de
l’action, la théorie et la parole. Ce qu’on a fait, c’est une prise de parole
par rapport à une musique instrumentale. Je me rappelle qu’on avait essayé de
faire ce premier disque instrumental en se disant qu’un jour on serait prêt à
poser des paroles mais il avait une crainte, même au sein du groupe les uns
vis-à-vis des autres. On n’avait pas fermenté encore, on était en train de
bouillir à des degrés différents chacun de notre côté. On avait conscience de
ce que les mots pourraient apporter.
R :
on a voulu laisser les choses s’exprimer. A un moment donné, on a senti qu’on
avait fait le tour de la musique instrumentale ; c’est la première chose
qui m’a poussé à dire que je voulais qu’il y ait des paroles.
J :
Roger travaillait sur le plan de la parole, du langage, et moi sur le plan de
la voix.
R :
on avait envie que ça se réponde
J :
et on pourrait dire le contraire aussi
R :
car tu écris plus que moi
J :
on voulait exprimer ce sentiment d’urgence
R :
surtout avec les tonnes de groupes instrumentaux qui ont déferlés
S :
au sein de Constellation notamment ; Roger, tu as fait partie de
« God Speed You!Black Emperor », je t’ai vu sur la dernière tournée
au Cabaret Sauvage à Paris.
R :
oui, j’ai arrêté depuis. Je voulais me focaliser sur cet album ; le groupe
passait toujours en second. Là, la démarche était de faire l’album et de le
faire tourner. Je voulais faire d’autres projets.
S :
vous avez tous des projets parallèles ?
J :
c’est normal, c’est même très sain.
S :
ça enrichit chacun des projets.
J :
j’aime pas dire le mot normal, mais oui, ça enrichit.
S :
ce ne sont pas les mêmes choses à dire qui ressortent suivant les personnes
avec qui tu joues.
J :
on se rend compte que nos amis les plus proches sont nos amis les plus
éloignés. Ils laissent cette distance respective qui rend l’amour et l’amitié
possible. Ça c’est le vrai questionnement.
R :
c’est du coton, des coussins ; et je pense qu’on a une vraie exigence par
rapport à la création.
J :
et puis c’est pas facile et très facile en même temps ; dans le sens que
la facilité, c’est un moment de respiration profonde quand on est asthmatique.
On est avec l’autre, on respire le même air. Des fois, la proximité fait qu’on
arrive pas à se le partager ; à se partager la parole qui y est incluse,
être capable de respecter la distance, accepter cette latitude à l’autre
d’exister. C’est un rapport à l’amitié.
S :
il y a un rapport passionnel aussi, une volonté d’optimisation du temps à
passer ensemble. Un sentiment d’urgence…
J :
c’est sûr, et se lever à 6h du matin après s’être claqué la tête à l’alcool
pendant 30 jours, ou écrire l’album à se motiver 3 jours par semaine à aller au
local ; et créer des choses, essayer, se tromper, appeler son amie et lui
dire « c’est de la merde ce que j’ai fait aujourd’hui, je me sens pas
bien ».
S :
c’est un faux équilibre, entre le plaisir, et les mauvais moments ressentis
parce que l’on s’investit pleinement dans l’aventure. L’échange est au cœur du
lien.
J :
oui, Fly Pan Am, ça reste un groupe extrêmement démocratique.
R :
tout à fait.
J :
c’est pas juste un mot, où il faut demander l’avis de tous, où on laisse la
parole. C’est aussi savoir s’exprimer, s’assumer à travers ça. La démocratie,
c’est pas « on veut savoir », c’est qui veut savoir, et qui veut
dire.
R :
et qui s’implique ; et là les choses ont commencées à grandir. C’est
vraiment qui s’implique : on a eu quelque chose de difficile à réaliser
dans ce groupe là. Il y avait certains membres qui s’impliquaient moins. Tu essayes
de les impliquer plus, mais tu te rend compte que c’est pas les aider ;
mais en fait il faut que tu t’assumes toi comme tu es, et tu vois comment ça
rebondit chez l’autre. A partir de là, tu choisis comment tu réagis, et cela
deviens comme des solitudes qui travaillent ensembles.
J :
des solitudes qui doivent grandir elles-mêmes en disant « je ne me suis
pas impliqué moi-même, parce que je passe au travers ». L’année dernière,
je me suis relâché un bout de temps ; je n’étais pas le seul mais à un
moment, ça n’avance plus ; tu te frottes aux gens mais à force ça ne
brille plus.
R :
ça devient passif.
J :
c’est comme lorsque tu as la charrue et le bœuf, et que les deux se regardent.
R :
même la charrue regarde !
S :
dans ce contexte, la portée de ce nouvel album, « n’écoutez pas »
dans la vie du groupe ? Qu’est ce que ça va projeter de nouveau ?
R :
au sein du regard de l’autre ?
S :
non, au sein de vous : tout ce qui est musical, c’est pris ou non par le
public. Mais après chacun va y faire sa lecture, y faire naitre un sentiment
particulier. Vous, vous le faites parce que vous avez besoin de dire quelque
chose, vous avez besoin de créer, et dans la démarche où vous vous trouvez, ça
va vous amener à quoi d’autres d’avoir utilisé la voix comme instrument ?
C’est pas simplement des paroles, ce sont des onomatopées…
J :
on se disait qu’il fallait essayer, qu’il fallait le faire. On avait plus le
choix. Et puis pour moi, je ne sens pas que j’ai appris à chanter, mais j’ai
appris comment m’y prendre si je m’y intéresse d’avantage. Et F.P.A. m’a appris
ce plaisir là, l’importance d’écouter de la musique instrumentale et la manière
que dorénavant je vais devoir appliquer pour composer de la musique à partir
des paroles. Maintenant cela doit être maîtrisé de façon plus subtile parce que
c’est toute la difficulté. Et ça me renseigne sur l’espace que ça laisse aux
paroles, aux idées qu’elles défendent, la complexité que cela prend par rapport
à l’autre aussi. Pour moi, c’est un mode d’apprentissage, c’est pas mauvais, je
ne m’attendais pas à cela.
R :
pour moi c’est pareil.
S :
si tu dois prendre la mesure de ce que tu dis pour que cela reflète au mieux ce
que tu veux exprimer.
J :
je ne m’attendais pas à faire le meilleur disque de paroles de tous les temps.
Je voulais être humble et honnête vis-à-vis de ma démarche.
R :
faire avec ce que l’on connaît et ce dont on est capable, et voir ce que cela
donne ; et voir où cela nous mène. Oser se casser la gueule.
J :
c’est déjà commencé, moi j’arrêterais pas…lui je le connais assez bien, c’est
un chanteur, il connaît des trucs.
R :
oui, mais ce qui me bloque, c’est les paroles ! au départ j’ai trop à
dire, et quand j’écris, je n’ai plus rien à dire.
S :
t’as pas l’écriture automatique !
R :
pas du tout ! j’ai rien d’automatique !
J :
moi, j’ai l’écriture automatique, mais je dis rien !
S :
aïe !
R :pour
ce qui est des paroles, qu’est ce que ça va donner au groupe, comment tu disais
ça ?
S :
quelle va être la portée pour vous, en répète par exemple, d’avoir vécu et
assimilé ces morceaux durant plusieurs mois de tournées, avec d’autres choses à
défendre ; ça va vous emmener sur d’autres questionnements. Comment le
pressentez vous ?
R :
c’est sûr que ça va nous amener à être en relation avec des désirs qu’on avait
peut-être ou peut-être pas. Et puis, ça va nous donner le potentiel ou la
volonté de persévérer par rapport à ces intentions, ces désirs qui sont la
chanson, les paroles.
J :
y’a un déplacement de la démarche artistique à cause notamment de la complexité
qu’il y a avec la parole, les mots et la musique. Pour moi, c’est pas comme
Georges Brassens. Il était accompagné, et les musiciens ne pensaient pas aux
textes. F.P.A., c’est cette démarche de al musique pensée parallèlement, c’est
très complexe, il faut penser autrement pour faire des paroles. Et puis la
réceptivité des gens, qu’elle soit bonne ou mauvaise nous pousse dans ce sens.
R :
ce n’est pas une finalité, c’est clair aussi.
S :
oui, il faut vraiment tendre l’oreille, les titres aident un peu à la
compréhension !
J :
et ce n’est pas une gêne nécessairement.
S :
c’est pour cela que je précisais tout à l’heure onomatopées.
R :
oui, c’est vrai, c’est un choix esthétique, dans le sens où pour ma part, je me
suis dis que pour chanter dans un groupe qui se veut démocratique, ça
m’intéresse pas une voix à part des autres. Donc, il faut que ce soit une voix
d’effacement.
S :
dans le mix, rentrée au sein des instruments.
R :
oui, c’est une voix qui est un instrument, et on ramasse ce qu’on peut avec.
D’ailleurs la plupart du temps sur l’album, les voix sont ensembles. Pas dans
tous les cas, mais cela arrive souvent que tu aies des arrangements de voix.
J :
on s’est mis à beaucoup l’écouter.
R :
on avait peur qu’il y en ait de trop. Mais on s’est mis à l’écouter plus et on
a eu envie d’arrêter la musique, d’enlever ce voilage. Quand on remet le son,
les guitares sont encore plus présentes.
S :
surtout dans ce dernier album, en fait,il y a eu une étape de franchit :
vous aviez un son très rond, tout en douceur ; c’est beaucoup plus tendu
désormais, guitares plus agressives en avant, ça change plein de choses.
R :
oui, tout à fait.
J :
je dois avouer, on a changé. C’est un peu difficile. Maintenant on peut se
lancer à tout faire.
R :
on a décidé de mixer…d’effectuer tout le travail.
J :
c’est pas par manque de confiance, c’est qu’on veut tout faire. Et puis on a
composé et pour une fois c’était plus virulent ; on a jeté plein de
trucs ; on a travaillé et quand on s’est trouvé à enregistrer, ça n’avait
plus rien à voir. On s’est posé beaucoup de questions, très radicales.
R :
il y a l’exemple de ce morceaux du dernier album : cela faisait 2 ans que
nous le jouions, et le changions pour finalement donner un rendu différent.
Maintenant le ton a encore totalement changé.
J :
c’est ça aussi la démocratie : les campagnes électorales commencent le
lendemain des votes.
R :
oui, oui, c’est comme ça !
J :
F.P.A., c’est autant de temps de dialogue, de réunion, que de composition.
C’est important comme démarche. La passion s’exprime par rapport à ce que tu
émets ; ce que tu exprimes dans les mouvements de ton corps, c’est la
pensée ; c’est un peu plus rigoureux dans un mode démocratique, c’est
normal que cela prenne plus de temps. C’est sûr qu’il y a des tensions qui sont
nées, exprimées et c’est tant mieux. Car si on n’avait pas réussis à sortir ces
tensions, on aurait encore des choses en nous, des non-dits. Il y avait aussi
que Roger, comme il le disait, a voulu faire ce disque là, uniquement en se
donnant à fond. Alors on s’est dit que là il fallait se donner à fond.
R :
on n’allait pas laisser des coins d’ombres.
J :
on savait quelle allait être la portée, car c’était très subtil, très prégnant.
C’est très personnel de savoir ce que l’on a eu le temps défendre. J’ai des
difficultés, mais j’ai un peu d’attentes, des choses à défendre, c’est certain,
mais j’ai aussi l’expérience de çà.
S :
dernière petite question, cette fois sur Constellation, votre label :
quelles sont vos relations avec lui, et avec ce qu’il représente ? C’est
un label particulier, qui jouit d’une aura, qui est respecté pour ses groupes
et les démarches, et notamment une identité militante. J’ai entendu que cela
peut parfois vous causer des désagréments : God Speed a été arrêté en
pleine tournée aux Etats-Unis pour être soupçonné de terrorisme. Ça vous
procure en contrepartie un bon accueil, une sympathie j’imagine ? Est-ce
que cela vous gêne ?
R :
sûr que oui, on est pas…Ce qu’il ne faut pas oublier dans n’importe quelle idée
de l’éthique, c’est que les gens sont différents. Donc si un label se voit
militant, ça ne veut pas dire que tout le monde dans le groupe l’est, et que
tout le monde dans le label l’est. Et puis, s’il ne le sont pas, ce n’est pas
qu’ils n’ont pas réfléchi autant aux choses, ou parce qu’ils sont bourgeois ;
je ne sais pas je dis un exemple bête là, mais par exemple nous,on est pas du
tout militants ; pas du tout. Il y a peut-être un moment où on a fait de
l’art subversif jusqu’à un certain niveau. Puis, je dirais pour ma part, et je
pense que les autres seraient d’accord avec moi sur ces questions là, on s’est
rendu compte à un moment de l’absurdité des objets de consommation
subversifs : oui, peut-être que c’est économique, peut-être que ça créé
des dialogues, mais ça reste des objets de consommations. On n’est pas prêt de
révolutionner le monde.
S :
c’est le paradoxe qu’ils contiennent qui empêche leur justification et
l’efficacité de leurs messages. Il y a une perte de sens.
J :
oui, Constellation et les militants, c’est comme parler du temps : c’est
quoi le beau temps, et c’est quoi le mauvais temps ? on ne peut pas dire
tout d’un coup que le soleil c’est le beau temps et la pluie, les nuages, c’est
le mauvais temps.
S :
on est dans la subjectivité, le rapport aux choses, à l’environnement.
J :
oui, je suis désolé, 7 jours dans le désert sans eaux, la pluie c’est pas le
mauvais temps.
R :
c’est une question de perspectives.
J :
pour répondre à ta question, je trouve que l’aura, je la trouve très présente
parfois ; ça fait en sorte qu’il n’y a pas beaucoup de place pour d’autres
températures.
R :
tu veux dire dans Constellation ; oui, on est un peu la bête noire ;
autant au niveau du son, et de notre engagement. On n’est pas placés
nécessairement de la même façon.
J :
je peux lire Baudelaire, Verlaine ; des textes utopiques, mais des fois je
trouve que l’idée d’utopie est restrictive, ça manque de vision. C’est aussi ne
pas écouter l’autre.
R :
oui, moi aussi. C’est comme se résoudre à prendre les subventions pendant des
années et puis jouer dans des salles de 5 personnes, où il peut en tenir
300-400, il y a un peu un dialogue qui meurt. Il y a quelque chose
d’irrespectueux.
J :
et d’irrespectueux aussi face à la différence. Et c’est pas que Constellation,
c’est tous ces labels indépendants : ils ont une étiquette indépendante et
ils y tiennent. Ils se disent labels indépendants, et ne laissent pas à l’autre
le choix de le déterminer comme tel.
S :
comme s’ils craignaient avec leurs subventions de ne plus être
indépendants ; c’est qu’ils doutent d’eux-mêmes probablement, peur de
s’être perdus en route.
J :
il n’y a plus de possibilités d’interprétation de la part de l’auditeur ou du
public. Il y a une arrogance à dire label indépendant.
R :
c’est déplacé ; au-delà de la distance, c’est une idée et oui, tu as
raison, c’est une fierté qui devient de l’arrogance. Y’a rien de mal dans la
fierté et l’arrogance.
J :
il y a un détachement qui se fait par rapport à la création, à la musique. Je
vais citer Brassens parce que pour moi c’est la plus belle des phrases de tous
les temps pour la création : « mourir pour des idées, d’accord,
mais de mort lente ». Il faut avoir le temps.
S :
et le militantisme, c’est aussi ça, prendre le temps de discuter avec des gens
autour de vous, de ce que vous ressentez et de ce que vous créez. Mettre en
perspective votre point de vue. Et les gens prennent, réfléchissent dessus, et
si ça les fait évoluer, tant mieux.
R :
pour moi, c’est ma relation à l’existence, j’ai dit que je ne suis pas
militant, et que je ne le serai jamais. Ça ne veut pas dire que je ne me pose
pas des questions et que je ne suis pas en relation avec ce qu’est l’éthique.
Là-dessus,
l’heure (une entière) a tourné, et la cassette avec, et nous retournons dans la
salle voir la première partie et se jeter un godet parce que mine de rien, ça
donne soif !
L'Autre
et un lien vers le blog de roger, où il parle de ce qu'il aime, bon chemin de découvertes: http://circeotones.blogspot.com/
il semble que depuis Fly Pan Am, il ait levé le pied sur la création. mais vous pouvez par exemple télécharger gratos une compilation télécharger gratos une compilation ici
merci à Greg Lucas, l'Archiviste et a l'ex fanzine orleanais What the Fuck!
extrait de l'album de Roger sous le nom LE REVELATEUR:
merci à Greg Lucas, l'Archiviste et a l'ex fanzine orleanais What the Fuck!
extrait de l'album de Roger sous le nom LE REVELATEUR:
BLEU NUIT from Sabrina Ratté on Vimeo.
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
RépondreSupprimerles videos sont disponibles en DVD ici: http://rootstrata.com/release/RS76
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