Bon : au début du siècle déjà, Claude DEBUSSY kiffait (grave) sa race sur le gamelan, découvert pendant l’expo universelle de 1889, ce qui devait par la suite révolutionner pas mal d'idées reçues sur les conceptions musicales occidentales alors centrées sur l'harmonie et la tonalité. Depuis, nul doute que cette forme musicale rituelle et entêtante venue d’une Indonésie encore mystérieuse aura influencé nombre de musiciens occidentaux, du minimaliste Charlemagne Palestine et son strumming acharné, au technoïde Pantha du Prince qui ne cache pas son obsession pour le timbre des gongs et cloches en tout genre.
Le genre musical en question n’a pas non plus échappé à la frange la plus extrême d’une bande d’électro-freaks de l'archipel japonais, dont la propension à assimiler pour mieux régurgiter les influences les plus diverses sans pour autant perdre sa nipponité est proverbiale. Je veux dire par là que l’underground « ultra » japonais règne sans partage lorsqu’il s’agit de se réapproprier les codes et les genres, nous délivrant de la sorte une vision pour le moins idiosyncrasique empreinte d’une fraîcheur et d’une naïveté désarmantes. Et la percussionniste Yoshimi P-WE, transfuge des mythiques (devenus mystiques) frapadingues BOREDOMS ne dérogera en rien à la tradition en faisant du gamelan le fil conducteur souvent ténu et retranché dans ses extrêmes) des élucubrations tordues ce nouvel opus de OOIOO (on prononce avec plus ou moins de bonheur « ooh ooh eye oh oh », tout comme Sunn O))) se dit « sun », et !!! se prononce tchiktchiktchik, ça va sans dire). Sans connaître entièrement leur discographie (déjà 6 ou 7 albums à leur actif), il semble que la mise en avant (ou au centre) des métallophones aux rythmiques et harmoniques à la fois complexes et linéaires ait considérablement arrondit les angles (extasiés) de leur musique, offrant de la sorte l'homogénéité salvatrice. Bon : on ne verse pas pour autant dans la facilité, les compositions sinueuses du groupe continuant de se télescoper à une vitesse ahurissante, que seuls les carillonnements métalliques parviennent encore à relier. Les références sont obsessionnelles, d'un space-rock-prog no wave perché aux japonoiseries azimutées se projetant dans une africanité fantasmée : beau travelling horizontal tout en syncope au cœur des musiques rituelles d'un monde imaginaire, appuyé par un remarquable travail vocal incantatoire, écho appuyé aux lointains MAGMA. Au bout du compte, du gamelan on n'en retiendra que sa colonne vertébrale. Là où on pense micro-tonalité et transe hypnotique appliquée, OOIOO nous convient avec ce grand sourire désarmant pour une grand' messe psycho-progressive dézinguée et faussement naïve.
La fin d'année commence pas si mal...
La fin d'année commence pas si mal...
l'Un
OOIOO "Gamel" (ThrillJockey. 2014)
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