Pour faire simple, « Flumina »,
ce sont les étincelles entre une électronique décharnée
et anguleuse et un piano mélancolique.
C'est en fait la troisième
collaboration entre ces deux musiciens que rien ne semble relier
d'emblée ; « Cendre » a d'ailleurs été très bien
accueilli à sa sortie sur le même label en 2007.
Ce n'est pas non plus la première
expérience de ce type pour le pianiste Ryuichi SAKAMOTO, celui-ci
ayant déjà exploré pareils chemins de traverse avec l'électronique
encore plus ténue et minimaliste d'Alva NOTO (l'austère album
« Insen »).
L'autrichien Christian FENNESZ lui,
parralèllement à une carrière solo conséquente et très en vue
(au hasard, « The Black Sea », "Venice"), se frotte régulièrement
à la crème de l'internationale avant-gardiste, qu'elle soit
spécifiquement japonaise ( Sachiko M, Otomo YOSHIHIDE...) ou non (
Mika VAINIO, Oren AMBARCHI...). Ce, toujours armé de sa simple
guitare electrique et d'un laptop.
Dès l'écoute des premiers morceaux, de fins ligaments se distillent, tout en délicate discrétion. On entre comme par une porte dérobée dans ce continuum. On n'écoute pas vraiment d'ailleurs : se laisser imprégner semble être la règle non édictée. FENNESZ laisse le piano noyé de réverbération étayer la structure mouvante du disque, ses nappes de guitare traitée en retrait pour mieux en envelopper l'autre. Les infimes cassures, fractales et scintillements electriques se fondent dans un drone lumineux à couches multiples, tandis que s'égrènent invariablement les arpèges distendus sur un mode spectral et erratique. Les morceaux sont longuement réfléchis et prennent le temps de se développer l'un après l'autre, sans qu'on sâche exactement où commence le suivant. Peu de choses à expérimenter ou à démontrer par rapport aux albums précédents : une fusion un peu plus poussée entre deux solitudes à la marge qui se rencontrent sans se jauger. Et une volonté affichée de pousser le concept dans ses retranchements : on parle tout de même d'un album qui s'étale sur le double de la durée de ses prédecesseurs.
Tout comme pour « Cendre »,
un parallèle un peu osé avec l 'ambiant music de Brian
ENO s'impose, comme un remake contemporain du célèbre « Music
for Airport » ou de ses réveries aériennes avec le pianiste
Harold BUDD ("Plateaux of Mirror"...).
Mais là où la musique d'ENO
investissait les salles d'attentes de l'aéroport, pour mieux apaiser
le voyageur en partance, la musique de Sakamoto et Fennesz
chercherait plutôt à habiter subtilement l'espace psycho-acoustique
du voyageur pressé comme pour mieux se fondre dans son univers
immédiat et glissant..
On se situe alors suspendu entre zone de transit et puissant ronflement du flux aérien.
L'espace est lisse et parfait.
Musique d'attente. Les regards s'évitent. L'humanité se croise et se tait le temps d'un instant.
Puis derrière nous, la porte en verre refermée, on laisse le tumulte de ce monde parvenir à nos oreilles en un faible bourdonnement apesanti.
… et le ciel est sous vos pieds.
On se situe alors suspendu entre zone de transit et puissant ronflement du flux aérien.
L'espace est lisse et parfait.
Musique d'attente. Les regards s'évitent. L'humanité se croise et se tait le temps d'un instant.
Puis derrière nous, la porte en verre refermée, on laisse le tumulte de ce monde parvenir à nos oreilles en un faible bourdonnement apesanti.
… et le ciel est sous vos pieds.
L'Un
Christian FENNESZ & Ryuichi SAKAMOTO : "Flumina" (Touch. 2011)
un extrait ici et l'album précédent Cendre en entier
le site de Fennesz et celui de Sakamoto
un extrait ici et l'album précédent Cendre en entier
le site de Fennesz et celui de Sakamoto
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