« The end of false metal » (Godflesh)
Ce putain de son. Des oreilles qui n’en finissent pas de saigner près d’une trentaine d’années plus tard. Avec la mention « ex-membres de Napalm Death » les flyers appâtaient un chaland alors ivre d’une musique alors toujours plus rapide, plus extrême. Audience hébétée. Des oreilles incrédules qui vacillaient sous une rythmique de plomb et ce mur de larsen. Une performance monolithique qui aura définitivement modifié mon approche jusqu’alors plutôt basique de la musique, confronté à quelque chose d’atonal, frontal et sans trop de concession (pour l’époque).
Alors oui ok d’accord,
le premier Godflesh ressemble plus à un discret coup d’essai si on le compare à
l’indépassable rouleau compresseur du Streetcleaner qui lui succèdera. Mais avec
ce premier Godflesh, tous les éléments
qui feront ou déferont le son et la
chair du groupe sont déjà alignés. Le duo de Birmingham est paré à faire
déferler sur un monde encore naïf son « avalanche (..Master Song »)
de guitares pitchées et de rythmiques martiales en pilotage semi-automatique.
Avec « Spinbender », les fréquences malignes des infra-basses
distordues se chargeront de parachever ce travail d’exécution dans les règles. Dans un mouvement rampant de syncope maitrisée, Godflesh vous prend aux tripes
avec la détermination lucide d’un zélote, tandis que la définition de la musique "métal"
jusque là assez orthodoxe en prend un sacré coup à s’hybrider de la sorte. Les
influences sont multiples et se superposent en strates épaisses et
sur-saturées : on pense à Killing Joke, l'indus deThrobbing Gristle, mais aussi à du
dub ou de la musique électronique (qui imprégneront dans des
proportions variables les albums
suivants). Mais l’hypnotique « Wound »
et ses transes de larsens technoides en boucles n’auront pas vraiment de filiation
directe dans la carrière de Godflesh, tout comme le nauséabond « Streetcleaner
2 » qui se perd dans des ambiances oppressantes de caniveau (qui
lorgneraient presque vers la misanthropie de l’acolyte Scorn). Ces deux derniers
brûlots abrupts (qui ne figuraient pas dans l’édition originale) connaitront
une suite dans les indénombrables side-projects
de Justin K. Broadrick. Par la suite, le duo versera parfois dans des
expérimentations abrasives et mutantes, sans néanmoins réellement s’éloigner
des canons gravés dans le marbre surchauffé de cet album éponyme. La formule
est restée simple : Godflesh se contente de décliner les mille et une
méthodes extatiques d'une interminable strangulation sonique.
L'Un.
GODFLESH (Swordfish. 1988)
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